L'Atlas des cartes
d'atterrissage
L’Atlas des cartes d’atterrissage est issu de l’expérimentation “Où atterrir ?” menée par le Collectif Rivage avec 65 participants réunis à la Scène nationale Carré-Colonnes, à la Manufacture CDCN, à l’École Supérieure des Beaux-Arts, à LaBase et à Cap Sciences depuis septembre 2021.
Le Collectif Rivage a créé, à partir du travail d’enquête et de pratique artistique mené en atelier, un Atlas des cartes d’atterrissage afin de pouvoir cartographier, de relier et de partager les récits d’enquête des participants. L’enjeu est de pouvoir aujourd’hui rendre l’Atlas accessible pour que les participants éditent eux-même leur contenu et tracent eux-mêmes les cartes d’atterrissage à partir de leur enquête. Ainsi l’Atlas deviendra un outil participatif et durable auquel les habitants auront accès pendant la durée du projet et au-delà.
Nous proposons de présenter les fonctionnalités de l’Atlas qui permet d’éditer six cartes d’atterrissage : les terrains de vie, les cartes de proximité et de superposition du territoire, la boussole des puissances d’agir et les cartes action, et enfin le cercle politique pour doléancer.
Design de l’Atlas des cartes d’atterrissage avec Figures Libres, juillet 2022.
01
Terrain de vie
Boussole, SOC - Consortium Où atterrir
La carte “Terrain de vie” est directement issue de “la boussole”, premier outil phare de l’expérimentation “Où atterrir ?” qui vise à redonner des capacités d’expression politique à des personnes en leur proposant d’enquêter à partir d’un concernement : un élément / une activité qui est essentiel, indispensable, vital et qui est menacé de disparaître. Chacun définit son concernement, son “caillou dans la chaussure” à partir duquel il déploie une enquête personnelle.
Mode d'emploi de la boussole, SOC
Les participants deviennent des citoyens-experts, accompagnés par les artistes-médiateurs dans un travail d’auto-description qui leur permet de repérer leurs propres conditions d’existence à partir de leur “concernement” qui est ensuite cartographié au moyen d’une boussole. Cette boussole est à la fois cartographiée et enrichie sur l’Atlas, et scénographiée au moment des ateliers. L’Atlas permet aux participants d’augmenter les ressources pour chaque “entité” avec la possibilité d’ajouter des contenus multimédia. Enfin il est possible d’archiver les différentes versions de la boussole au fur et à mesure de l’enquête et d’en révéler l’évolution au moyen d’un curseur “historique “qui s’active de façon dynamique comme une timeline.
La carte "terrain de vie" sur l'Atlas des cartes d'atterrissage
02
Action et
boussole des puissances d'agir
Les boussoles et les enquêtes des participants créent de nouvelles relations aux problèmes territoriaux et offrent de nouveaux agencements possibles. En effet, les cartes permettent de modifier les positions des acteurs et de retrouver de la prise sur la situation initiale.
Ainsi les participants voient leurs capacités d’action renouvelées et œuvrent à la résolution de l’enquête. Ces actions peuvent aussi créer de nouvelles coopérations entre les acteurs qui souhaitent contribuer au moyen de “cartes ressources”. Ces coopérations sont activées au moyen de la boussole des puissances d’agir.
03
Proximité et
superposition des territoires
Certaines enquêtes peuvent aussi révéler des relations de proximité ou même de superposition des territoires. Les cartes dynamiques permettent de cartographier l’épaisseur et la complexité de ces relations d’interdépendances territoriales et créer de nouvelles alliances entre les participants.
La carte "superposition"
La carte "proximité"
04
Le cercle politique
Enfin, une fois que la puissance d’agir est épuisée, si le problème initial n’est pas entièrement résolu, les participants peuvent activer le cercle politique pour doléancer avec une administration ou une institution en vue de la résolution de la situation. Ce cercle politique, conçu par Walter Lippmann dans “Le Public fantôme”, a pour vocation de revitaliser le cercle politique essentiel au fonctionnement démocratique. Cet outil a été repris pendant l’Université d’été Où atterrir 2022 par le philosophe Bruno Latour et marque l’objectif final de la démarche “Où atterrir ?” initié en 2019 à Saint-Junien.
« Le Cercle ne peut subsister par une substance, seulement par la quête de sa subsistance propre. [...] Ce Cercle, même repris, ne laisse pas plus de trace durable que si vous l’aviez dessiné sur le sable ou sur l’eau : il faut encore recommencer : si vous vous arrêtez, il disparaît : à sa place vous n’avez plus que la multitude dispersée, grondante, mécontente, violente, déçue — ou, pire encore, indifférente, dispersée, inadressable ; vous n’avez plus que des élites appuyant vainement sur des « leviers de commande » qui n’obéissent plus et ne transmettent aucun effet ; vous n’avez plus qu’un peuple de râleurs impuissants tout juste bons à s’indigner sans savoir de quoi s’indigner. Retour immédiat de la « crise de la représentation » ; abîme à nouveau béant entre le « haut » et le « bas » ; dispersion assurée ; aucun accord possible ; les ennemis attendent au-dehors pour « nous » attaquer. Pourquoi faut-il toujours recommencer ? Mais parce que le Cercle est impossible ! À l’aller comme au retour. Le multiple devient un, l’un devient multiple, cela ne peut pas fonctionner ; cela doit fonctionner ; donc il faut tout reprendre.
Le mieux que l’on puisse espérer, c’est que, à force de tracer le Cercle et de le reprendre, des habitudes se forment qui permettent peu à peu de compter sur sa reprise. Chaque segment se sent tenu d’agir et capable de parler de façon à ne pas interrompre ce mouvement paradoxal [...], comme si chacun se préparait à prendre position dans l’attente de l’étape suivante. Alors se forme peu à peu comme une culture politique qui rend, de proche en proche, de moins en moins douloureux l’entretien du Cercle, sa reprise, son expansion. La démocratie devient une habitude. On commence à prendre le pli de la liberté. »
Bruno Latour, Enquête sur les modes d'existence